Il y a un temps pas si lointain, je pensais que les émotions étaient mes ennemies. J’ai en effet appris qu’il fallait être forte et ne pas pleurer, qu’avoir peur c’était être une chochotte, que grandir c’était arrêter d’être dans la joie et que je devais ravaler ma colère. J’ai obtenu un Bac+12 en gestion apparente des émotions. Résultat : j’ai expérimenté une déconnexion totale à moi, une sur adaptation aux autres, un déni de mon ressenti et du sur place dans ma vie. Youhou !
Pourquoi les émotions ont parfois une mauvaise image ?
Technique de survie
De quoi se coupe-t-on lorsqu’on n’exprime pas ses émotions ou qu’on les réprime ? Il y a souvent des croyances derrière les émotions : la tristesse mène à la dépression, la colère mène à la folie, la joie est synonyme de superficialité, la peur est synonyme de lâcheté.
Être atteinte par ses émotions nous met en danger. Si l’on se mettait à exprimer nos émotions, on pourrait passer pour hystérique. L’une des solutions pour se protéger est d’essayer de s’en couper. Ainsi, quand on me demandait il y a quelques années ‘que ressens-tu ?’, je pouvais dire ‘rien’ avec un peu de fierté. Cependant en me coupant de mes émotions, je me coupais de la vie en moi et je ne pouvais pas accueillir les émotions des autres. Comment faire quand je vois quelqu’un qui pleure quand cela est source de faiblesse pour moi (même s’il s’agit de mon propre enfant) ?
L’insensibilité prônée par la société
Dans mon éducation, j’ai appris à me fier davantage à ma raison qu’à mes émotions. Il y a encore une méconnaissance des émotions et de leur rôle dans la société même si cela bouge petit à petit. Ainsi, la parentalité bienveillante prône l’accueil de l’émotion des enfants. Le mot caprice n’est plus à la mode. Si l’enfant exprime sa colère, c’est qu’il a un message à faire passer. On admet de mieux en mieux l’hypersensibilité d’un enfant ou d’un adulte. Mais se révéler hypersensible est encore difficile dans certains milieux professionnels ou dans certaines familles. La société nous pousse à nous couper de nos émotions pour réussir dans les études ou professionnellement et on demande aux enfants d’être stables émotionnellement quand on n’arrive pas à l’être en tant qu’adulte !
Pourtant, quelle joie de retrouver toute une palette d’émotions dans les représentations artistiques ! Les artistes nous touchent car ils savent parler avec leurs émotions et non parce qu’ils prononcent un texte sans faute de prononciation. L’émotion est une invitation à la magie, à la reconnexion à notre humanité et n’est pas forcément synonyme de perte de contrôle de soi. Exprimer ses émotions ne devrait pas être un talent réservé aux artistes. Nous pouvons chacun et chacune être les acteurs de notre vie. Je ne suis pas obligée de porter un masque pour me fondre dans une société qui ne me correspond pas.
Nous appellerons émotion une chute brusque de la conscience dans le magique
La peur de l’expression des émotions
On a peur de l’expression de nos émotions et de l’expression de l’émotion des autres. Comme si laisser un enfant exprimer sa colère allait faire de lui une horrible personne plus tard. On a peur de l’émotion car à force de l’avoir tût, quand elle s’exprime en nous, on passe d’un extrême à l’autre : de l’indifférence au pétage de plomb. Bien sûr, les crises de colère font peur mais en s’écoutant et exprimant au fur et à mesure ce qui se passe en nous (par la communication non violente par exemple), cette crise n’arrivera que rarement, voire jamais. Tirer sur la corde jusqu’au burn-out ne nous donnera pas de médaille du mérite.
Le danger avec les émotions, ce ne sont pas les émotions en elles-mêmes mais ce qu’on en fait :
- les cacher : risque d’explosion. Ces émotions sont des clignotants : on passe du vert au jaune puis du jaune au rouge. L’idée est de ne pas attendre d’être dans le rouge pour les traiter
- les interpréter : risque d’erreur et de mauvais jugement
- les utiliser contre quelqu’un : risque de manipulation
- rendre quelqu’un d’autre que moi responsable d’elles : risque de déresponsabilisation
- s’attribuer la responsabilité de l’émotion des autres : risque de fausse culpabilité et de relation toxique
- agir sous le coup de la colère : risque de faire n’importe quoi et de le regretter
“Une vie sans émotion est une vie perdue.” Roger Fournier
Pourquoi et comment se reconnecter à ses émotions ?
Risque d’interprétation des émotions :
Mes émotions parlent de moi (et que de moi). Quand on ne connait pas bien les émotions, on peut avoir l’impression que les autres en sont responsables. Maurice me met en colère mais en fait, si je suis en colère c’est que mes limites ont été franchies et que c’est de mon devoir de les reposer. Accueillir et analyser nos émotions nous permet d’aller vers notre individualité, vers ce qui nous porte vraiment et donnera du goût à notre vie. C’est dommage d’essayer de les taire. L’avantage quand je sais qu’une émotion ne parle que de moi, c’est que j’arrête de prendre l’expression de l’émotion de l’autre personnellement. La colère de l’autre lui appartient et je n’ai pas à le ‘sauver’. J’évite ainsi une possible relation dysfonctionnelle.
“C’est le mérite de la science, d’être exempte d’émotion.”– Oscar Wilde
Comment se reconnecter à soi ?
Quand on n’a pas eu l’habitude de s’écouter, une aide extérieure peut être nécessaire : sophrologue, thérapeute, kinésiologue, micro-kiné, reïki…L’idée est de prendre un rendez-vous avec soi-même pour savoir ce qui se passe en nous, faire le vide pour accueillir et s’entrainer à s’écouter.
Une fois que nous sentons une émotion présente en nous, nous pouvons l’accueillir :
- En prenant le temps de respirer, de se poser, d’écouter ce qui se passe dans notre corps
- En identifiant le besoin ou la valeur qui a été touchée.
- La peur nous indique un besoin d’être rassuré-e
- La colère indique un besoin d’être respecté-e
- La tristesse indique le besoin d’être consolé-e
- La joie indique le besoin d’être apprécié-e, aimé-e
- En vivant ce qui se passe en nous et en n’essayant pas de lutter ou nier l’émotion.
- En nous parlant et en parlant à l’émotion. On peut aussi lui donner un rdv à un autre moment ‘je te sens tristesse, je ne peux pas m’occuper de toi immédiatement mais je prendrai le temps de t’écouter ce soir’.
- En ne réagissant pas immédiatement (sous la colère surtout)
J’accueille les émotions sans jugement, sans chercher forcément à comprendre immédiatement. Je peux ressentir de la tristesse pendant quelques jours. Si je fais tout pour ne pas la ressentir, elle reviendra.
Et après ?
Une fois que nous avons écouté notre émotion, nous pouvons prendre du recul plus facilement pour agir et modifier notre comportement (exemple : poser des limites) et ainsi nourrir notre besoin. L’idée est de faire des modifications de notre comportement, de nos limites progressivement afin de nous rapprocher de ce qui est bon pour nous (et non ce qui est ‘bien’ pour la société)
Les émotions ne sont plus mes ennemies mais au contraire, elles sont des alliées très proches. Je me sers de mes émotions pour découvrir quels sont mes besoins non satisfaits. Quelque chose me rend triste ? Qu’est-ce que cela veut dire ? Je n’ai plus peur de traverser l’intensité d’une émotion. Je l’invite même à me traverser car elle ne reste pas une fois que j’ai compris le message qu’elle m’apportait. Le problème est que culturellement on n’accorde pas beaucoup d’importance au fait de savoir décrypter ces messages. Ne pleure pas, sois forte ! Tant que je n’aurai pas écouté mon émotion, elle reviendra et tapera chez moi de plus en plus fort. Et c’est en ne l’écoutant pas qu’on risque un problème de santé.
A force d’être à l’écoute de mes émotions, de façon fine, je n’ai plus de journées entières en mode down. Puisque je ne lutte pas, le message est clair de plus en plus rapidement. Et je ne mets plus de drame derrière une émotion et je ne suis plus paralysée par elle (en mode ‘je ne peux rien faire car je ne me sens pas bien’)
Pour finir de te convaincre d’écouter tes émotions :
Une bonne gestion des émotions présente de nombreux avantages
- Moins de mental, plus de légèreté et d’énergie
- Sentiment de bien-être – hello sérénité
- La fin de l’auto flagellation : non je ne suis pas responsable des émotions de la terre entière
- Plus de clarté sur qui on est et ce que l’on veut
- Un passage à l’action plus rapide.
- Un moment désagréable à court terme pour une vie agréable à long terme
Les émotions me permettent de me connaître, de me connecter à mon intuition et à mon plaisir et de faire des choix qui partent de moi et non des injonctions diverses. Résultat : je n’ai plus de regrets et j’assume mon authenticité.
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